Info ou intox ? Je réponds à vos questions sur l’édition

1er décembre 2022

Un disclaimer avant de commencer : je réponds à vos questions en me basant sur mon expérience du milieu en tant qu’ancienne agente littéraire, ancienne assistante d’édition, future éditrice freelance et autrice. Je ne prétends pas détenir une vérité universelle : le milieu de l’édition est complexe et vaste et on y trouve de tout !

1. Est-ce que c’est vrai que les éditeurices peuvent changer le titre de mon roman ?

Info. Le titre d’un manuscrit proposé en ME est soumis à changement. C’est un élément marketing très important (c’est la deuxième chose qui doit accrocher le lectorat après la couverture) et c’est quelque chose sur lequel on n’a pas toujours le recul nécessaire en tant qu’auteurice. Donc oui, le titre peut être amené à changer !

2. Est-ce que c’est vrai qu’il faut absolument un titre pour présenter un manuscrit en ME ?

Plutôt intox mais c’est quand-même bien d’en présenter un. Même s’il est soumis à changement, le titre est une première porte d’entrée dans l’univers, il transmet quelque chose de l’œuvre, donc c’est toujours bien d’y réfléchir et de proposer quelque chose aux éditeurices.

3. Tu peux nous expliquer les attentes sur l’orthographe ?

Pas une question « info/intox » mais l’orthographe est importante. Les ME reçoivent beaucoup de soumissions et, si on n’attend évidemment pas des auteurices des manuscrits impeccables sans aucune faute, on demande quand-même un minimum de propreté dans le texte. A partir du moment où les fautes rendent la lecture du texte compliquée, l’éditeurice risque de ne pas continuer sa lecture. Faire une passe avec un logiciel de correction comme Antidote par exemple peut s’avérer une bonne technique si vous avez des difficultés en orthographe : ça vous permettra de donner à votre texte toutes ses chances.

4. Est-ce que c’est vrai que certain.es auteurices arrivent à vivre uniquement de leurs ventes ?

Info, en revanche je n’ai jamais travaillé avec des auteurices qui vivaient de leur plume. Je sais que c’est possible évidemment, mais je n’ai jamais rencontré d’auteurices qui étaient dans cette situation. En revanche, je sais que ce sont souvent des artistes qui ont plusieurs livres publiés et qui sont installé.es dans leur carrière.

5. Est-ce que c’est vrai qu’on n’a pas le droit du publier sur Wattpad un roman édité ?

Info ! Une ME qui signe votre texte vous demandera, s’il est déjà sur Wattpad, de le retirer de la plateforme (parfois on a le droit d’y laisser les deux/trois premiers chapitres mais même là, il faut demander). En effet, si la ME « investit » dans votre texte pour le retravailler, le corriger, le publier, il serait contre-productif de le laisser disponible en ligne gratuitement, même dans une version antérieure non-corrigée.

6. J’ai pas de question mais il faut se méfier des éditeurices !

Pareil, ici même si ce n’est pas une question, je réponds oui : en tant qu’auteurice, vous n’avez souvent pas les mêmes connaissances du milieu que votre éditeurice, ce qui vous place dans une situation inégalitaire dans laquelle la ME a plus d’infos que vous et ne vous livrera pas forcément toutes les infos avec la transparence nécessaire. Prenez le temps quand vous entrez en contact avec une ME de bien vous renseigner sur elle, sur ses titres et si vous le pouvez de discuter avec des auteurices qui sont signé.es au sein de la maison afin de voir avec elleux comment se passe/s’est passée leur collaboration avec l’entreprise. 

7. Est-ce que c’est vrai que c’est cher de publier son livre ?

Info et intox : ça dépend du contexte.
Si on parle d’édition traditionnelle : INTOX ! En maison d’édition vous n’avez pas à payer quoique ce soit pour être publié.e car vous cédez vos droits d’exploitation de votre roman à la ME contre le travail que va faire l’entreprise sur la publication du livre.
Si on parle d’autoédition : info. En autoédition, c’est l’auteurice qui s’occupe de tout le travail de publication (travail éditorial, correction, couverture, impression si impression il y a,…) et donc des frais que ça engendre. C’est donc un budget, plus ou moins conséquent en fonction de la façon dont vous voulez publier votre roman.

8. Est-ce que c’est vrai que les éditeurices sont des auteurices râté.es et frustré.es ?

Intox : contractuellement, rien n’empêche les éditeurices d’être des auteurices publié.es, ce sont deux métiers différents qui ne sont pas incompatibles. L’idée que les éditeurices soient des auteurices « râté.es » est complètement clichée et fausse.  

9. Est-ce que c’est vrai qu’on peut être repéré.e par les réseaux sociaux ?

Info et intox je dirais.
Pour un ouvrage pratique, on peut être démarché.e sur les réseaux pour parler d’un sujet spécifique : écrire un livre sur « comment créer un podcast » par exemple. A ce moment-là, on démarche quelqu’un pour écrire un livre sur un sujet précis, et le fait que la personne ait une grande communauté est un gage de crédibilité.

En revanche, hors du côté ouvrage pratique donc pour la fiction, je ne l’ai jamais vu pour le moment (je ne compte pas Wattpad comme un réseau social, mais par contre oui, on peut être repéré.e sur Wattpad, c’était d’ailleurs une partie de mon travail en agence littéraire de repérer des textes prometteurs sur cette plateforme pour les amener vers la publication en ME). Les gens qui ont l’air « d’être repérés » sur les réseaux sont des personnes qui ont déjà publié en autoédition ou sur wattpad et qui ont ainsi intéressé une ME. En revanche, je n’ai jamais vu une ME démarcher quelqu’un simplement parce qu’un profil instagram leur plaisait, c’est le texte qui prime.

10. Est-ce que c’est vrai que les éditeurices mettent longtemps à répondre voire ne répondent pas ? Pourquoi ?

Info malheureusement. Il y a tellement de soumissions en ME que dans les petites et moyennes ME, dans lesquelles il y a une toute petite équipe, c’est très chronophage et on ne va pas toujours trouver le temps de répondre car il y a d’autres choses urgentes et des obligations contractuelles à gérer. Pour les grandes ME, il y a souvent des services de soumissions (souvent gérés par des stagiaires ou des alternant.es d’ailleurs, mais c’est une autre histoire), auquel cas je trouve plus difficile à avaler de ne pas recevoir de réponse, même si c’est un mail de type « automatique ».

11. Est-ce que c’est vrai que business is business et les coups de cœur des éditeurices n’ont pas leur place ?

Info et intox à nouveau ! Parfois, on va avoir des coups de cœur sur des ouvrages qu’on ne peut pas publier (ils ne correspondent pas à la ligne éditoriale, on n’a pas la collection pour les publier, on en a déjà publié un qui y ressemblait beaucoup, commercialement il ne correspond pas aux attentes du marché et ça ne va pas se vendre,…) et ça peut être un crève-cœur. Mais quand un coup de cœur correspond à la ME et à son lectorat, on ne va pas passer outre et on va lui donner sa chance.

12. Est-ce que c’est vrai que la plupart des manuscrits ne sont pas lus ou à peine ?

Celle-là va piquer mais… Info. Là encore, toutes les ME fonctionnent différemment, mais de mon expérience, c’est majoritairement vrai. Déjà avant les confinements de 2020 (avant donc que le nombre de soumissions explose), si un manuscrit ne séduisait pas sur les deux/trois premiers chapitres, on n’allait pas plus loin. Il y a tellement de soumissions en ME que le jugement sur un texte est très rapide. De plus en plus depuis 2020, on demande aux auteurices de fournir un synopsis avec leur soumission et si ce synopsis ne plait pas, le manuscrit n’est tout simplement pas lu.

13. Est-ce que c’est vrai qu’être auteurice n’est pas un vrai métier/est un métier tranquille ?

Intox ! Aux yeux de la société, c’est encore quelque chose qu’il est difficile de faire valoir, mais auteurice est un vrai métier qui mérite reconnaissance et rémunération. Sans auteurice, pas d’industrie du livre ! De la même manière, ce n’est pas un métier « tranquille » : écrire et publier un livre demande beaucoup de travail, d’investissement et de temps et n’est pas quelque chose qui est apprécié (socialement et financièrement) à sa juste valeur.

14. Est-ce que c’est vrai que l’édition est un milieu difficile et misogyne ?

Info. Pour cette réponse, je suis 100% biaisée et je ne vais pas le cacher. Oui, le milieu est difficile et compétitif et oui, il est misogyne aussi. J’ai été victime de harcèlement quand j’ai travaillé en entreprise dans l’édition et aux vus des mouvements « me too » ou « balance ton éditeur », je sais qu’on est beaucoup de personnes sexisées à avoir vécu ça malheureusement. Il y a sûrement des éditeurs respectueux dans cette industrie, mais quoiqu’il arrive, je vous demande de faire attention à vous.

15. Est-ce que c’est vrai que les maisons d’édition préfèrent un one shot à une saga pour un premier roman ?

Et c’est une info aussi pour cette dernière question ! Pour un.e primo auteurice c’est délicat de se lancer sur une saga car on ne sait pas quel accueil va être fait à cette saga par le lectorat. Publier une saga est un risque plus élevé car ça engage plus de frais financiers. Plus il y a de tomes, moins vous avez de chances de signer un contrat d’édition. Bien sûr, on publie parfois des sagas écrites par des primo auteurices, mais c’est plus rare.

Morgane Luc script doctor et lectrice sensible

Morgane Luc

Hey, moi c’est Morgane, autrice et podcasteuse ! J’ai créé “Confidences d’écriture” pour partager ma passion pour l’écriture, la lecture et mes conseils en édition.

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