Interview avec Mahé
Organiser une dédicace en librairie
22 septembre 2022
Aujourd’hui on reçoit Mahé sur le podcast pour parler de dédicaces en librairie ! Mahé est libraire dans la région lyonnaise et ael organise les événements dans la boutique où ael travaille.
1. Hello Mahé, est-ce que tu peux te présenter ?
Mahé : Salut, moi c’est Mahé, j’ai 24 ans je suis libraire dans le 69 et je m’occupe depuis un an de tout ce qui est dédicaces d’auteurices et de jeunes auteurices.
2. Avant de commencer, dans quel univers livresque vis-tu en ce moment, que ça soit en lecture ou en écriture ?
Mahé : En ce moment, je suis dans un mood très fantasy médiévale grâce à la série du Seigneur des anneaux, mais je n’ai pas forcément de livre en cours. Avec la rentrée littéraire, c’est un peu compliqué !
3. Comment es-tu devenux libraire ? Est-ce que tu as suivi une formation ? Depuis combien de temps fais-tu ce métier ?
Mahé : A l’origine, je n’ai pas formation dans les métiers de la librairie. J’ai suivi quelques formations en ligne sur les métiers du livre, que je ne recommande pas forcément, mais je suis devenux libraire il y a un an, quand on m’a donné l’opportunité de travailler dans un espace culturel. Je suis aujourd’hui dans ma deuxième librairie, une enseigne indépendante. Pour moi, entrer dans le milieu a été une opportunité que j’ai saisi.
Je dirai qu’il y deux types de librairies : les structures indépendantes, où il est pratique d’avoir une formation surtout si l’entreprise est petite, et les espaces et enseignes qui sont de gros groupes et sont plus ciblés sur la vente, où là on est plus conseiller.es de vente qu’autre chose et c’est plutôt la culture littéraire qui prime par rapport à la formation professionnelle.
4. Est-ce que tu peux nous présenter ce que tu fais dans la librairie où tu travailles, dans quels domaines littéraires ou de la boutique tu te spécialises ?
Mahé : J’ai beaucoup de casquettes. Mon secteur de prédilection c’est la BD, un genre en pleine ampleur grâce au Pass Culture, et je m’occupe également de la SFFF côté adulte. De fil en aiguille, j’ai aussi repris les réseaux sociaux de la librairie et la mise en place de dédicaces et d’événements. Je suis un peu libraire et community manager ! On est une petite équipe, donc j’ai de grosses journées et c’est pas toujours évident de découper mon temps de travail entre toutes les facettes de la librairie dont je m’occupe.
5. Tu organises donc des dédicaces, notamment avec des auteurices autoédité.es : tu as d’ailleurs accueilli Aimelou il y a quelques mois. Peux-tu nous expliquer ce qui t’as donné envie de lancer cette initiative ?
Mahé : De base, je ne tiens pas en place, autant dire que le défi d’organiser des événements me plaisait beaucoup. Dans mon ancienne librairie, j’avais pu voir le fonctionnement des dédicaces rapidement et quand j’ai changé d’entreprise, j’ai découvert que mes collègues n’aimaient pas s’occuper de ça. Je me suis dit que j’allais essayer car j’adore faire venir des auteurices en librairie et les client.es en sont très friand.es aussi !
Un jour, j’ai rencontré une autrice en salon pour me faire dédicacer son livre et elle m’a dit « invite-moi plutôt en dédicace dans ta librairie, je te signerai le livre avec plaisir à ce moment-là ». C’est un peu comme ça que tout a commencé. J’ai organisé cette dédicace en janvier dernier et depuis, je mets en place ces animations !
En parallèle, je discutais effectivement avec Aimelou sur Instagram et on s’est rendux compte qu’on était pas très loin : c’est comme ça que de fil en aiguille, on a organisé sa venue !
6. Comment ça se passe pour organiser une dédicace : comment choisis-tu les auteurices, est-ce qu’iels te contactent ou est-ce que c’est toi qui le fait, comment vous mettez tout ça en place ?
Mahé : il y a plusieurs façons de faire dans notre librairie :
- Les ME nous contactent et nous « envoient » leurs auteurices en dédicace : c’est la façon la plus simple de procéder car on s’occupe « seulement » de la réception de livres et de l’accueil de l’auteurice. Pour tout ce qui est règlement, négociation de réductions supplémentaires sur le livre, c’est avec la maison d’édition que ça se passe.
- Je démarche des auteurices : il y a beaucoup d’événements littéraire dans la région Rhône-Alpes et j’ai donc l’occasion de participer à des salons et de rencontrer des auteurices, surtout en BD, puisque c’est mon domaine. Ça reste simple de les démarcher et de les inviter. Après, j’ai aussi pu démarcher des auteurices sur les réseaux sociaux par exemple car quand je le tague sur des posts certain.es répondent et sont ravi.es de venir en dédicace. Ce genre d’interaction me fait toujours beaucoup plaisir !
- Les auteurices locaux.ales viennent parfois nous voir en magasin : pour les petites ME, ça arrive souvent. C’est plus ou moins le même travail qu’avec les grandes ME, on traite directement avec l’entreprise.
Et enfin il y a les auteurices autoéditées, qui viennent nous présenter leur livre pour faire du dépôt vente, c’est-à-dire prendre quelques exemplaires et les mettre en rayon. C’est quelque chose que je ne fais pas : je ne veux pas mettre sur les étagères un titre que je ne pourrais pas conseiller et vendre, donc quand c’est comme ça, je préfère proposer aux auteurices une dédicace. Iels passent la journée à la librairie, je peux les entendre pitcher et parler de leur livre et après, je prends quelques exemplaires car je sais désormais de quoi parle le livre et j’aurai plus de facilité à le vendre par la suite.
Ici, le fonctionnement est complètement différent : la librairie traite avec l’auteurice directement. On règle toutes les questions financières et d’organisation en avance, car elles sont source de stress pour les auteurices : on pose une date, on échange les informations et documents dont on a besoin pour procéder au règlement notamment, on parle des pourcentages de vente,… En fonction des librairies, on prend quand-même un pourcentage sur la vente des livres : en moyenne 30%, certaines boutiques prennent moins mais si elles prennent plus, négociez ! Concernant le dépôt vente (s’il a lieu après la dédicace), je choisis le jour J en fonction du titre (de quoi ça parle,…) combien de livres je prends pour les rayons.
Pour le règlement, on applique la procédure standard de librairie avec les auteurices autoédité.es, c’est-à-dire qu’iels sont payé.es sur la vente de leur livre (si vente il y a) soixante jours après la vente.
Pour un dépôt vente, il ne faut pas s’attendre à vendre une vingtaine de livres : cinq c’est déjà beaucoup, vu la concurrence qu’il y a en librairie. C’est déjà incroyable d’avoir eu l’occasion de faire une dédicace et d’avoir donner sa chance à votre ouvrage !
Ce que je vous conseille aussi, c’est de venir rechercher vos livres s’ils ne se vendent pas. Prenez des nouvelles régulièrement, sinon vos romans invendus dorment sur nos étagères et c’est de l’argent de perdu pour vous : si on ne les vend pas, vous n’êtes pas payé.es, car on vous règle en fonction des ventes.
7. Comment les choses se déroulent-elles le jour de la dédicace ? Comment accueilles-tu l’auteurice, est-ce que tu es là pour le côté « soutien moral »,... ?
Mahé : Je fais tous les mois des affiches avec le planning des rencontres et des dédicaces qui sont affichées dans le magasin, chez nos partenaires et dans les commerces alentours. On prépare également une vitrine spéciale pour mettre en avant la dédicace et on fait forcément de la pub sur les réseaux sociaux. Quand les auteurices font leur propre publicité, c’est également un gain de temps pour nous et une belle vitrine pour elleux.
La veille, je prépare la table pour la dédicace, avec les livres si je les ai (si c’est l’auteurice qui les amène on les installe quand iel arrive), les affiches explicatives,… ça rend toujours les gens très curieux. Donc le jour J, quand l’auteurice est là, la communication a déjà bien été faite et les client.es sont au courant.
A l’arrivée dans la boutique, je fais visiter rapidement les lieux et je laisse les auteurices s’installer. Pendant la journée, j’essaie de passer les voir pour m’assurer que tout se passe bien. Je leur propose souvent qu’on mange ensemble à la petite cantine vegan du coin, c’est toujours plus sympa. J’essaie d’être là en soutien et de les aider à déculpabiliser/déstresser même si ce n’est pas toujours évident, je le comprends.
8. Est-ce que vous ciblez vos dédicaces en semaine ou plutôt le samedi ?
Mahé : On le fait surtout le samedi, parce que c’est là qu’il y a le plus d’activité, mais ça nous arrive aussi d’avoir des dédicaces le mercredi, puisque c’est le jour des enfants.
Il peut y avoir des événements le soir en semaine, mais c’est plus des tables rondes ou des discussions que des dédicaces. C’est une organisation très différente, que je n’ai pas encore eu l’opportunité de mettre en place, mais ça pourrait être très intéressant aussi !
9. J'intercale une question qui vient de me venir à l’instant : pour les auteurices autoédité.es avec Amazon KDP, est-ce que vous acceptez de faire du dépôt vente ou est-ce que vous préférez ne pas travailler avec des livres imprimés par Amazon ?
Mahé : Je n’ai jamais eu ce cas, mais de manière générale la librairie ne peut pas se procurer de livres édités par Amazon car c’est eux le seul vendeur. Le problème c’est que pour une dédicace, les auteurices autoédité.es viennent avec leurs livres pour faire un dépôt vente et que je ne sais pas si c’est possible dans le cas d’Amazon. Si les auteurices peuvent se récupérer un stock de leur livre et me le déposer, vu le travail qu’iels ont fourni pour partager leur histoire, je ne vais pas refuser. Par contre je ne sais pas si c’est rentable pour elleux !
10. Il me semble que tu travailles sur un projet de librairie en ligne, est-ce que tu veux nous en parler un peu ?
Mahé : J’ai en effet pour projet d’ouvrir une librairie inclusive en ligne et j’attends pas mal de réponses de potentiels soutiens et organisations avant de pouvoir avancer, donc j’en suis au point mort. J’ai toujours très envie de pouvoir mettre en avant plein de livres inclusifs et des auteurices autoédité.es avec des marges plus faibles que celles que pratiquent ma librairie actuellement. Pour le moment, je n’ai pas encore les fonds et je me renseigne énormément côté administratif et création d’entreprise. C’est un projet qui me tient beaucoup à cœur, mais je ne sais pas encore quand et comment je pourrais le mener à bien.
11. Un mot de la fin ?
Mahé : Aux auteurices qui pourraient être intéressé.es par les dédicaces : c’est normal d’avoir peur, mais sincèrement lancez-vous. Les gens sont ravis d’avoir de l’animation et des auteurices en librairie et ça permet de faire découvrir votre univers à plein de personnes. Faire une dédicace ça peut paraître effrayant et c’est normal, mais n’hésitez pas à poser vos questions à vos libraires, on est là pour vous aider.
Si vous avez apprécié cette entrevue avec Mahé, vous pouvez retrouver sa douceur et sa bienveillance sur instagram (@maheandco).
Morgane Luc
Hey, moi c’est Morgane, autrice et podcasteuse ! J’ai créé “Confidences d’écriture” pour partager ma passion pour l’écriture, la lecture et mes conseils en édition.